Décidemment, la Biennale de Shenzhen regorge de projets plus intéressants les uns que les autres ! Après le Dom-Ino Pavilion et le Zhulang Huagai, c'est sur l'installation His House and Her House du Wutopia Lab que se porte notre attention. Un dytique hétérosexué rose et bleu qui exacerbe des clichés au sein du foyer.

Cette installation conceptuelle de 226 mètres carrés est le résultat de la rénovation de deux petits bâtiments dans le bidonville urbain de Shenzhen (Chine), répondant aux consignes données par les responsables de la Biennale : réinterpréter la cuisine comme lieu de convivialité. Un thème qui a amené les créateurs à se questionner sur les rôles « normés » des hommes et des femmes en ce lieu si spécial.

Le projet permet également de s'interroger sur les moyens à déployer pour contribuer à l'amélioration nécessaire des zones précaires de la région de Shenzhen. En effet, le parti pris de l'événement était d'intégrer tous les pavillons et espaces d'exposition dans des quartiers délaissés et de sélectionner des interventions qui pourraient contribuer à leur amélioration, et par la même occasion de celle de la vie de leur population composée de travailleurs immigrés et des nouveaux arrivants peu aisés.

Pour ce faire, Wutopia Lab imaginent deux demeures distinctes : une aux traits « masculins » et l'autre à l'allure « féminine ». Un choix qui se traduit par l'usage de revêtements monochromes bleu et rose. Pour His House, les architectes construisent un ensemble massif et géométrique composé de trois pièces et de toilettes publiques. L'une de ses salles est blanche, en référence au sel, l'un des premiers conservateurs alimentaires utilisés par l'être humain. Côté testostérone : l'on retrouve par exemple dans les parois composées de culots de bouteilles de bière ou dans les suspensions en tranches de bacon, un clin d'œil au soi-disant goût plus prononcé des hommes pour la viande rouge, qui s'inscrit dans une liste de clichés humoristiques.

Pour ce qui est de la maison voisine, la « force » de la première demeure laisse ici place à une structure plus « raffinée » et ouverte sur l'extérieur. La présence de garde-corps aux motifs gracieux et alambiqués, combinée à la légèreté des persiennes dissimulant de larges baies vitrées appuient la volonté du collectif de créer un bâtiment inspiré de l'image stéréotypée de la femme : fragile et élégante. Comptant dix pièces partiellement meublées sans réelles fonctions, cette construction contraste fortement avec son pendant « viril ». Et à aucun moment les deux bâtisses ne se touchent, comme pour appuyer un peu plus les oppositions hommes/femmes.

Un concept qui peut paraître simpliste mais dont les couleurs vives attirent les regards sur cette zone urbaine laissée à l'abandon. En effet, le désir des maîtres d'œuvre était, à travers ces représentations ironiques, de montrer que des forces complémentaires sont nécessaires au remaniement des dizaines de quartiers comme celui-ci à travers la Chine. Le bleu devient alors la couleur de la survie et de la force, quand le rose est assimilé à la douceur et à la patiente. Des vertus complémentaires dont le rajeunissement urbain ne peut se passer.

Un ying et un yang revisité, au message plus profond qu'il n'y paraît.

Pour en savoir plus, visitez le site de la Biennale de Shenzhen

Photographies : Al Qing



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